Il ressort de cette enquête parue dans le quotidien mercredi 11 avril 2012 que les dépassements sont surtout le fait des médecins hospitaliers qui reçoivent leurs patients en consultation privée, et qu'ils sont plus élevés dans les zones surmédicalisées. Résultat, en 2011, sur les 5,7 milliards d'euros de dépenses de soins restés à la charge des assurés ou de leurs mutuelles, 2,3 milliards sont imputables aux seuls dépassements !
Des excès plus nombreux à Paris
La capitale est la ville où les dépassements sont les plus élevés en moyenne. Plus de 6 % des praticiens factureraient leur consultation entre 3 et 4 fois le tarif de base de la Sécurité sociale. Soit 5 fois plus qu'à Lyon et 6 fois plus qu'à Nice. Considérés globalement, les tarifs des généralistes et des spécialistes parisiens sont en moyenne de 15 € supérieurs aux tarifs de la Sécurité sociale ; un écart qui monte à 20 € pour l'ensemble des spécialistes, et à près de 30 € pour les spécialistes à honoraires libres.
Les médecins installés dans les autres grandes villes françaises sont moins gourmands. Leurs tarifs sont certes supérieurs à ceux de l'Assurance maladie, mais dans des proportions plus raisonnables : de 1,5 € à Toulouse à 8 € à Lyon... Un delta qui s'explique aussi, en partie, par le fait que c'est à Paris que les médecins pratiquent le plus les dépassements : environ 45 % d'entre eux, contre seulement 20 % des médecins strasbourgeois et 12 % des médecins marseillais. Autrement dit, à Marseille, près de 90 % des médecins respectent les tarifs de la Sécu.
Des dépassements plus élevés à l'hôpital
C'est ce qui explique leur concentration à Paris, selon l'enquête du Monde. Sur les 66 médecins qui pratiquent plus de cinq fois le tarif de la Sécu, 55 sont des hospitaliers, dont 52 parisiens.
L'activité privée à l'hôpital avait déjà été pointé du doigt par le magazine 60 millions de consommateurs, qui avait constaté le caractère prohibitif des tarifs pratiqués dans ce cadre, en particulier pour les actes techniques. Le magazine citait alors l'exemple d'une prothèse de la hanche, dont la pose est remboursée sur la base d'un tarif de convention de 459,80 € et dont le prix pouvait grimper jusqu'à 4 250 € !!!
Des sanctions qui tardent à venir
Une seule règle régit les dépassements d'honoraires : les médecins doivent appliquer leurs tarifs avec "tact et mesure". Autrement dit, un médecin peut appliquer des tarifs plus élevés, selon sa notoriété, mais il doit les moduler selon les moyens et la situation de chaque patient.
Hélas, le système reste très opaque. En 2008, l'Assurance maladie avait lancé une première opération de contrôle, qui avait abouti à un règlement des conflits dans la discrétion, tous les médecins visés alors ayant accepté de réduire leurs prétentions... mais certains aujourd'hui les relèvent de nouveau !
Une nouvelle campagne est en cours, nous apprend l'enquête, qui viserait 28 hospitaliers et 250 libéraux dont les tarifs sont supérieurs à 4 fois le tarif de remboursement. Des professionnels qui mettent en avant de nouvelles techniques et la cherté des équipements et des locaux pour justifier leur coût. Mais les sanctions ne semblent pas à l'ordre du jour, ni la Sécurité sociale, ni l'Ordre des médecins ayant pour l'instant véritablement décidé de suivre ces abus.
Seul espoir que les choses changent, une intervention du politique. Il ressort d'un sondage réalisé avant les élections présidentielles que 52 % des sondés souhaitent encadrer les dépassements et que 32 % souhaitent les interdire purement et simplement. Interrogé avant les élections, François Hollande indiquait souhaiter un "encadrement strict" des dépassements, sans expliquer toutefois comment il s'y prendrait. A suivre...